Magazine sur la vie en Israël

Trois Suisses en Israël – Trois histoires

dans Entre les Lignes/La Suisse en Israël


Environ 22 000 citoyens suisses vivent en Israël. Nous en avons rencontré trois pour parler de leur vie, de leur mal du pays et de leurs choix de vie……

 

 

Monique Heymann

Engagée pour les Suisses en Israël

« C’est un hobby onéreux mais qui m’apporte énormément de satisfaction ». C’est par ces mots que Monique Heymann (33 ans) décrit son engagement en tant que déléguée du Conseil des Suisses de l’étranger. „Au sein du Conseil, elle agit en faveur des intérêts des Suisses vivant à l’étranger. Pour cela, elle se rend deux fois par ans en Suisse, pratiquement à ses frais, pour participer aux réunions du Conseil. Elle estime que les thèmes les plus importants sont les suivants : « Nous devons faire avancer le vote par Internet. Il n’est pas acceptable que de nombreux Suisses vivant à l’étranger ne puissent voter, car les documents n’arrivent pas dans les temps ». Par ailleurs, la jeune femme qui a fait son aliyah il y a 5 ans espère que les discussions menées avec les banques suisses vont rapidement déboucher sur des résultats positifs. Il faut en effet savoir que pour les Suisses vivant à l’étranger l‘ouverture d’un compte bancaire dans leur mère patrie est subordonnée à des coûts élevés.

Monique Heymann est également engagée dans d’autres combats. Parallèlement à son activité dans une société high-tech, elle organise régulièrement des tables rondes pour les Suisses en Israël et gère le groupe « Swiss in Israel » qui compte 800 membres. Certes, ils n’assistent pas tous aux tables rondes, mais pour Monique Heymann ces soirées n’en sont pas moins un succès. « Nous nous sentons à la maison en parlant schwytzerdütsch ou français avec les participants. Nous nous énervons pour les mêmes raisons et nous rapportons des choses du pays chaque fois que nous y allons ». Le Greyerzer (gruyère) que Monique Heymann aime particulièrement est l’un des produits dont elle déplore le plus l’absence en Israël, presque autant que celle de sa famille, sa sœur et ses parents vivant en Suisse.

Monique Heymann, qui vit à Tel-Aviv, est globalement très heureuse dans sa nouvelle patrie : « Je me sens parfaitement bien ici, j’ai des amis formidables, j’aime

la nourriture et le climat ». En revanche, la hausse continue du coût de la vie l’inquiète beaucoup : « Les prix sont devenus fous à Tel-Aviv. En tant que célibataire, on arrive encore plus ou moins à s’en sortir mais je me demande comment font les familles ».

 

Moshe Gabay et sa famille (photo : privée)

Moshe Gabay

« Ici, on vit comme si chaque jour devait être le dernier »

A dix-neuf ans, Moshe Gabay a quitté la Suisse pour s’installer en Israël. Il voulait vivre la vie qu’il connaissait depuis son enfance lorsqu’il passait ses vacances en Israël. Moshe Gabay dont le père est Israélien et la mère Suisse et non-Juive, a toujours été considéré dans son pays natal comme un Israélien et un Juif ne fut-ce qu’en raison de son nom. Mais une fois installé dans l’Etat hébreu, il s’aperçut que la vie était très différente de l’idée qu’il s’en était faite. Moshe Gabay décida en effet de s’enrôler. « Mes cousins étaient aussi à l’armée et j’avais quelque chose à prouver. Nous étions en pleine seconde intifada et l’armée a été l’horreur absolue pour moi. Pas un jour où je n’ai souffert ». Fort heureusement, cela remonte maintenant à 21 ans. Moshe Gabay vit aujourd’hui avec sa femme originaire de Hollande et ses trois jeunes enfants dans un kibboutz sur le Golan. En quittant récemment Jérusalem pour s’installer dans le kibboutz, la famille a pu réaliser son rêve.

Le quadragénaire a gardé la Suisse dans son coeur et conservé les réflexes «suisses» dans sa profession de guide touristique. « Ma suissitude est mon avantage majeur par rapport aux autres guides. Je pense à long terme et j’investis à 100 pour cent dans mes clients. Ils savent qu’ils peuvent me faire confiance, je suis d’une honnêteté absolue ». Ces qualités font malheureusement parfois défaut dans le secteur. Quand Moshe Gabay s’est lancé dans cette activité sur les conseils de sa mère qui travaille elle-même comme guide, il a souvent été choqué par les méthodes pratiquées par la profession. « Au début, j’ai été beaucoup trop conciliant et j’ai dû apprendre à m’imposer. Encore aujourd’hui, j’ai souvent le sentiment que mon travail est une lutte sans fin. On peut rarement faire confiance aux autres, chaque non peut se transformer en oui, ce qui évidemment offre parfois aussi des avantages ».

Tout cela explique aussi pourquoi la famille est si importante pour Moshe Gabay. Ses parents sont venus en Israël il y a quelques années, son frère va s’installer prochainement dans le même kibboutz que celui où il habite. Il travaille d’ailleurs étroitement avec son frère. Leur entreprise Keshet organise des voyages et des événements sur mesure pour un public plus spécifiquement chrétien. Les deux frères continuent à parler le schwytzerdütsch ensemble. « C’est la langue dans laquelle je me sens le plus moi-même ».

Voyager n’est pas seulement la profession de Moshe Gabay mais également son

activité préférée. Il voyage plusieurs fois par an avec sa femme et ses enfants, allant jusqu’aux Etats-Unis et en Asie. Dernièrement, il s’est rendu en Suisse pour un voyage d’affaires avec son aîné de neuf ans. « Nous avons fait du snowboard pendant deux jours. Pour moi, cela a été le rêve absolu d’apprendre à mon fils ce sport que je pratiquais en tant qu’enfant ». Ce bref périple fut un franc succès.
« Mon fils a été enthousiasmé par la Suisse et la raclette est maintenant son plat préféré ».

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Michelle Holtz est arrivée en Israël à l’âge de 18 ans (photo : privée)

 

Michelle Holtz

« Il ne m’est pas arrivé un seul jour de faire quelque chose que je n’aimais pas »

Michelle Holtz a eu du mal à quitter Jaffa. Michelle, originaire de Suisse, a vécu avec son partenaire, le designer produits Dov Rattan, pendant dix ans dans ce quartier pittoresque où elle avait également une boutique pour objets design israéliens près du marché aux puces. « Mais il est arrivé un moment où nous n’avons plus pu faire face aux frais ». Le couple a ensuite eu la chance de trouver une maison à Yehoud, à environ 30 minutes au sud de Tel-Aviv.

 

Pour Michelle Holtz, qui était venue en Israël à 18 ans uniquement pour suivre un cours linguistique et passer une année à Jérusalem, vivre en Israël a été le bon choix, malgré les problèmes financiers qu’elle a dû régulièrement affronter. « Je viens d’un foyer sioniste et Israël a toujours été quelque chose de positif pour nous. Lorsque je suis arrivée à Jérusalem à l’époque, un monde totalement nouveau s’est ouvert à moi. La diversité des populations, le côté ouvert des choses. J’ai grandi à Lucerne et lorsque j’ai quitté la ville en 1978, elle avait encore un côté très provincial ». L’architecte et designer d’intérieur est d’ailleurs retournée une fois à Lucerne où elle a vécu avec ses trois enfants pendant un peu plus de sept ans.

L’une des raisons qui l’ont poussée à revenir en Israël en 1990 a été qu’il n’y avait pas à l’époque, en Suisse, de services de garde à l’enfance, de sorte qu’elle ne pouvait pas travailler à temps plein. De retour en Israël, Michelle Holtz a découvert sa passion pour la couleur. Toutefois, pas dans le monde de la mode mais dans celui de la restauration de bâtiments. « En fait, je me suis bricolé un métier qui n’existait pas encore. Avec ce culot qu’on ne peut acquérir qu’en Israël, je me suis rendue à la municipalité de Tel-Aviv et je leur ai dit : je suis conseillère couleurs pour bâtiments ». Depuis, Michelle Holtz a rendu leur beauté et leur lustre à plus de 2 000 immeubles à Tel-Aviv, Netanya, Kfar Saba, etc. Elle a fait une carrière qu’elle n’aurait, d’après elle, pas pu réussir dans son pays natal. « Mère de trois enfants, je me suis mise à mon compte en Israël et je me suis créé un métier que j’aime encore aujourd’hui. Je n’y serais pas parvenue en Suisse. Ici, il ne s’est pas passé un jour où je n’ai pas aimé ce que je faisais ».

Un immeuble aux couleurs choisies par Michelle Holtz (photo : privée)

Il n’en reste pas moins que la Suisse manque beaucoup à la sexagénaire : « Les montagnes, les lacs, une promenade le long de la rivière, tout cela m’apaise et me manque beaucoup ici. Certes, nous avons aussi de superbes paysages en Israël, dans le nord, sur le Golan, mais le trafic est épouvantable et les embouteillages ruinent le plaisir. Sur ce plan et concernant le coût de la vie, la Suisse l’emporte haut la main sur Israël ».

Michelle Holtz est arrivée en Israël à l’âge de 18 ans (photo : privée)

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