Obtenir le maximum avec un minimum de ressources : Israël aux jeux olympiques 2012 de Londres

dans Entre les Lignes/Rapport mensuel

Dans le sport également, Israël fait feu de tout bois et veut obtenir le maximum avec un minimum de ressources. Jusqu’à présent, Israël a gagné en tout sept médailles olympiques et espère une bonne moisson à Londres. Si tout va comme souhaité, le pays remportera une médaille dans une nouvelle discipline.

Par Samuel Suter

Le sport national d’Israël est la matkot, une sorte de tennis de plage, et le toc toc de la balle sur les raquettes en bois fait partie d’une journée d’été à la mer au même titre que le bruit des vagues. La plage de Tel-Aviv, qui s’étend sur des kilomètres, dispose de nombreuses installations de beach-volley. D’innombrables nageurs s’ébattent dans l’eau, au milieu des véliplanchistes et des surfeurs. La promenade (tayelet en hébreu) est envahie par les joggeurs et les promeneurs.  Dans de nombreux bars et kiosques, les clients suivent avec passion des événements sportifs sur les écrans de télévision, ces dernières semaines l’Euro 2012, même si Israël n’y participe pas. Depuis que plusieurs footballeurs israéliens ont été recrutés, il y a une quinzaine d’années, par de grands clubs européens, les matchs de la ligue anglaise et de la ligue espagnole sont régulièrement retransmis en direct avec des commentaires en hébreu. Ville jeune et vibrante, Tel-Aviv est folle de sport et de fitness, mais dès qu’on parle des jeux olympiques, les gens secouent la tête avec résignation et changent de sujet.

Trois objectifs pour les jeux olympiques

Le comité olympique israélien a fixé trois objectifs aux quelque quarante athlètes qui participeront aux jeux de Londres : „obtenir une médaille dans une nouvelle discipline“, „avoir une Israélienne sur la plus haute marche“ et, plus modestement „ramener au moins une médaille à la maison“. A titre de comparaison, l’Allemagne enverra près de 400 athlètes à Londres.

Le Dr Ido Nevo, chercheur au Collège Sapir dans le sud du pays, étudie notamment l’importance sociale du sport. Au cours de notre entretien, en bon Israélien qui se respecte, il est plutôt laconique et quelque peu désenchanté. Le passé sportif d’Israël, notamment le bilan lors de rencontres internationales, n’est pas très brillant et il pense en connaître les causes. Israël a participé pour la première fois aux jeux olympiques en 1952 et aux jeux d’hiver de Lillehammer en 1994. A l’époque, l’“équipe“ se composait en tout et pour tout d’un patineur artistique : Michael Shmerkin. Vivant à Odessa jusqu’en 1991, il avait été formé dans l’Ex-Union Soviétique et a été champion d’Israël de 1996 à 1998 et de 2000 à 2002. De nombreuses disciplines sportives ont d’ailleurs été apportées à Israël par ses émigrants.

Depuis 1952, Israël a gagné sept médailles olympiques. La Suisse, pays de taille comparable, en a engrangé dix fois plus. Pour la plupart des Israéliens, l’association „Israël et jeux olympiques“ n’évoque pas, de prime abord, des records mais la prise d’otages par des terroristes palestiniens pendant les jeux de Munich en 1972 qui s’est terminée par un bain de sang avec l’assassinat de onze athlètes israéliens.

Depuis 1992 et sa première médaille olympique – en judo – Israël a obtenu chaque fois au moins une médaille aux jeux d’été. Gal Fridman a gagné en 2004 la première médaille d’or en planche à voile.

Des conditions idéales  – sur l’eau

Les sept médailles israéliennes ont été remportées dans les disciplines suivantes : planche à voile, canoë et judo. Pourquoi dans ces sports ? Efraïm Zinger, secrétaire général du comité olympique, a une explication toute trouvée  : „pour des disciplines comme la planche à voile, nous disposons pendant au moins dix mois par an d’un terrain d’entraînement idéal : la mer Méditerranée. Le climat chaud, optimal pour les sports nautiques, est en revanche peu propice à de nombreux autres sports. Pour l’athlétisme, le pays manque à la fois d’infrastructures et de tradition“. Zinger ajoute : „les athlètes européens peuvent facilement se rendre en voiture dans les camps d’entraînement internationaux. Pour nous, c’est beaucoup plus compliqué à mettre en place et nous avons besoin de toute une logistique“.

Côté infrastructures et soutien financier du gouvernement, Ido Nevo constate avec regret qu’Israël est la lanterne rouge des pays développés. Les sports nautiques et le judo sont les sports rois en Israël car la mer et le vent offrent le cadre idéal à la planche à voile, et le judo ne nécessite pas d’infrastructures spéciales.

Qui rapportera une médaille dans une nouvelle discipline ?

Quand on interroge des Israéliens sur les succès de leurs sportifs aux jeux olympiques, il préfèrent parler des jeux paralympiques. En effet, côté médailles Israël y occupe une excellente treizième place, devancé seulement par des pays beaucoup plus grands. „Nous avons gagné énormément de médailles aux jeux paralympiques à cause de nos guerres“ explique Ido Nevo. En effet, dès les années 60, l’Etat a mis en place de remarquables centres de rééducation pour ses soldats blessés et handicapés. Et ces efforts ont été payants, entre autres avec ces athlètes de haut niveau qui ont permis de gagner des dizaines de médailles fin des années 60 et dans les années 70. „Si nous devions faire face à une nouvelle guerre, nous gagnerions à nouveau de nombreuses médailles“ ajoute avec fatalisme Ido Nevo.

Après les championnats du monde de natation en mai qui ont rapporté pas moins de cinq médailles à Israël, dont sa première médaille d’or, le pays compte sur ses nageurs pour accomplir des performances. En gymnastique également, les espoirs de médaille sont fondés. Alexander Shatilov a remporté le bronze aux derniers championnats d’Europe. La médaille olympique commémorative de la Banque d’Israël pour 2012 est d’ailleurs consacrée à la gymnastique, discipline dans laquelle le pays espère un exploit.

La véliplanchiste Lee Korzits, triple championne du monde dans sa catégorie, sera probablement la porte-drapeau de l’équipe à Londres. C’est sans doute à elle qu’on pense en espérant une Israélienne sur la plus haute marche. Disposant d’une vaste expérience des rencontres internationales depuis sa première participation aux jeux olympiques d’Athènes en 2004, championne du monde en titre depuis 2011, elle a toutes les chances de gagner.

Londres – et l’après Londres 

Il existe de bonnes raisons aux ambitions sportives et aux espoirs de succès d’Israël. Depuis trois ans, le budget des sports triple chaque année et a atteint 30 millions de dollars. Par ailleurs, l’Etat a prévu de consacrer 1,5 milliard de dollars à l’amélioration des infrastructures. L’institut Wingate de Netanya, comparable au centre sportif de Macolin en Suisse, jouit d’une grande renommée, également à l’étranger. Des équipes européennes apprécient de s’y entraîner en hiver tout en profitant de la douceur du climat israélien à cette époque de l’année.

Israël prépare actuellement la 19ème Maccabiade 2013, en quelque sorte les „jeux olympiques juifs“, qui accueillera 10 000 athlètes juifs du monde entier. En 2013 également, Israël organisera les championnats d’Europe de football UEFA des moins de 21 ans. Le sport occupe une place grandissante dans le pays et de bonnes performances de l’équipe israélienne à Londres donneraient encore plus de force à cette dynamique

Autres informations :

Les sportifs israéliens veulent remporter des médailles (en anglais), 28.05.12
http://www.timesofisrael.com/israeli-athletes-aim-for-olympic-medals/

Israël se prépare aux jeux olympiques (en anglais), Israel21c.org, 14.06.12
http://israel21c.org/culture/israel-on-route-to-the-olympics/

Korzits porte-drapeau, Reuters.com, 14.05.12
http://www.reuters.com/article/2012/05/14/us-oly-yach-sawrsx-korzitz-idUSBRE84D06O20120514