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Les fêtes solennelles et la pauvreté en Israël

dans Culture & Sports/Entre les Lignes

Par Katharina Höftmann

En Israël, le mois de septembre est placé sous le signe des fêtes juives. La saison des fêtes solennelles débute pendant le mois d’Eloul lorsque le shofar est sonné tous les matins des jours de semaine. La fête de deux jours de Rosh Hashana marque le début de l’année juive. Elle est suivie, une semaine plus tard, par Yom Kippour (jour de l’expiation ou Grand Pardon) qui marque l’apogée des fêtes solennelles. Pendant les 25 heures que dure la fête de Yom Kippour, nous ne mangeons ni ne buvons. Le Grand Pardon est immédiatement suivi par les festivités de Souccot : les Juifs construisent une sorte de cabane (ce logement provisoire est bâti en souvenir de la sortie d’Egypte) dans laquelle, pendant neuf jours, ils passent en famille la plus grande partie de leur temps, y mangeant et, souvent, y dormant.

Les dix jours entre Rosh Hashana et Yom Kippour, appelés « jours redoutables », représentent une période très particulière au cours de laquelle chaque Juif réfléchit à ses actions durant l’année écoulée et peut demander pardon pour les fautes commises envers d’autres. Erev Yom Kippour, c’est-à-dire la veille de Yom Kippour, est un moment de partage consacré à pardonner à son prochain. Yom Kippour est le jour du Grand Pardon où les Juifs se repentent de leurs péchés envers D.ieu.  La croyance selon laquelle L’Eternel inscrit dans un livre comment sera pour chacun l’année à venir, s’il vivra ou mourra, s’il sera heureux ou malheureux, est si profondément ancrée dans l’esprit juif que même les moins religieux se souhaitent mutuellement « Gmar ’Hatima Tova » (une bonne signature). C’est une idée très juive de penser que le jugement de D.ieu sur chacun lors de la fête de Rosh Hashana n’est pas définitif. Que nous avons dix jours entiers pour réfléchir à nos actions, pour prendre conscience de nos erreurs et de nos fautes, pour demander pardon et pour pardonner nous-mêmes aux autres. Que D.ieu sera clément si nous reconnaissons nos errements et si nous prenons conscience que nos actions ont blessé des personnes. C’est également une période où il est crucial de faire des dons.

Une récente statistique de l’Institut national des assurances montre qu’en Israël de nombreuses personnes sont dans le besoin. En 2018, 21,2 pour cent de la population vivaient dans la pauvreté et 30 pour cent des enfants étaient concernés par cette situation. La pandémie a encore aggravé les choses. Au paroxysme de l’épidémie, plus d’un million d’Israéliens se sont retrouvés au chômage et quelque 155 000 personnes sont tombées dans la pauvreté. Chacune d’elles et près d’un enfant sur trois risquent de ne pas avoir suffisamment à manger pendant les fêtes. Ils seront dans l’incapacité de se concentrer sur la partie spirituelle des jours à venir, car trop occupés à lutter pour tout simplement survivre.

Les organismes de dons et de bienfaisance comme Leket, l’équivalent israélien de Tafeln qui récupère des aliments parfaitement comestibles et les distribue à des personnes dans le besoin, sollicitent particulièrement les citoyens durant cette période afin qu’ils aident les plus démunis et les plus faibles. Certes, Israël peut se targuer d’une réussite impressionnante. C’est le pays des start-up qui a conclu des contrats et obtenu des marchés se chiffrant en millions de dollars au plus fort de la pandémie. Ici aussi, les riches sont devenus encore plus riches au temps du coronavirus. Mais Israël est aussi le pays qui, par rapport aux autres Etats membres de l’OCDE, enregistre le plus fort taux de pauvreté chez les enfants. C’est le pays dans lequel 25 pour cent des rescapés de la Shoah vivent dans un complet dénuement.  C’est le pays où le nombre de sans-abri ne cesse d’augmenter dans les grandes villes comme Tel-Aviv et Jérusalem, où de larges pans de la société, notamment chez les ultra-orthodoxes et dans les communautés arabes, se battent pour survivre face à l’exorbitant coût de la vie, où des parents qui cumulent parfois les emplois sont dans l’incapacité d’acheter le moindre jouet à leurs enfants.

C’est toujours terrible de vivre dans le besoin mais, pendant les fêtes juives où les repas ont une importance considérable, l’épreuve est particulièrement douloureuse.

Pour de nombreuses familles israéliennes pauvres, acheter des légumes verts et des fruits est un luxe (photo : KHC)
Pour de nombreuses familles israéliennes pauvres, acheter des légumes verts et des fruits est un luxe (photo : KHC)

Autres informations :
Progression de la pauvreté en Israël (en anglais), JPost

https://www.jpost.com/food-recipes/tens-of-thousands-of-israeli-families-could-have-no-food-on-rosh-hashanah-677877

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